jeudi 5 juillet 2007

ORPHELIN ET SDF


§ 9 ORPHELIN ET SDF
"Qu'est-ce qui vous amène, qu'attendez-vous de ces consultations?" M'avait-il demandé. J'avais trouvé des réponses en croyant tout ignorer et je sentais qu'un avenir existait, qu'il était même présent par ces paroles. Mais, déjà, je me retrouvais orphelin et abandonné...
A quatorze ans, je m'étais surpris racontant cette histoire d'orphelin à ma tante, pendant qu'elle était au volant de sa voiture. Je me demandais soudain comment une telle construction fantasmatique avait pu naître en moi! A mon insu, cela s'entend!... Cette histoire fait le penchant, quelques années plus tard avec la même, qu' une certaine Madame Rivière avait cru entendre alors que je lui racontais seulement l'anecdote d'un chat qu'on n'avait plus jamais revu. Elle me posa une question induisant la méprise que je n'osais même pas rectifier! Je trouvai la situation trop ridicule à ses dépends et de plus, la dimension du fantasme m'aparaissait grandiose... J'y voyais une réminiscence de l'histoire que j'avais racontée à ma tante. Si je lui disais la vérité, je croyais savoir qu'elle aurait dédramatisé l'anecdote du chat en jouant d'une métaphore "quelconque" et de ce fait, elle aurait ainsi annulé l'effet de réminiscence.
- En fait, se mit-il à dire, depuis que vous êtes tout petit, vous avez vécu de nombreux évènements très marquants?
Je trouvais le mot faible... Quel mot d'ailleurs? Mais je ne relevais pas... Je savais que cette histoire d'orphelin stigmatisait le départ de la terre de naissance, qu'il y avait véritablement eu abandon et que personne autour de moi n'avait pris en compte la souffrance qui s'est développée ensuite. En portant seul ce fardeau, il s'alourdissait de jour en jour et induisit progressivement ce que je ressens ce matin: je me retrouve SDF dans la tête et personne ne veut me voir!
Si j'arrêtais mon écriture, ce serait grave! S'il fut un temps où je n'avais pas peur de m'enfoncer dans cet espèce de "suicide social", il me semble aujourd'hui, hors de question d'en rester là. Cette métaphore n'est qu'une figure de style dans laquelle je peux très bien ne pas m'identifier. M'identifier me désintéresse, je disais me victimiser!... Tendance à aller chercher le pire, l'accident par exemple. C'est ce que j'avais lu dans ses yeux alors qu'il s'étonnait... Il avait dit: "Mais pourquoi? N'avez-vous pas justement réussi à...?" et moi de répondre:
Mais oui, bien sûr! Tout à fait!
Alors, comment pouvez-vous analyser cela aujourd'hui?
Je ne sais pas justement, je ne comprend pas!...
La mémoire élastique me renvoyait les évènements de mon enfance et les répétitions de ma jeunesse par un système de ricochets... mais aussi les impressions sclérosées qui en ont découlées tout au long de ma vie adulte! A ce moment-là, je sentais que j'avais le droit de sortir du lit chaud de la sclérose des souvenirs. Maintenant, j'ai le droit de vivre sans porter partout sur moi les étiquettes de ces signifiants écrans. Je sens que je peux crever ces écrans en les jetant sur le bord du chemin. Je sens qu'ils m'apartiennent toujours malgré tout, que je peux à tout moment les refaire miens, leur existance étant indiscutable!

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