mercredi 13 août 2008

COMME UN POEME!



















Où étaient donc passée cette douce atmosphère des collectes d'indices?... Elle ramassait des petites choses qui devenaient lourdes de souvenirs! Il est vrai que ces rituels étaient liés au peu de temps passé dans les lieux. Un mois ou deux, tout en y revenant plusieurs années de suite... Mais ces jours-là, elle avait l'impression d'arriver dans une nouvelle période de sa vie. Peut-être s'agissait-il du passage à l'âge adulte... Cela l'amusait!
Après ces réflexions, lui apparue une image qu'elle trouvait superbe: le bruit des volets de bois qu'on ferme par une tiède soirée d'été au clair de lune... Le Samouraï fumait sa cigarette sur le pas de la porte en buvant une bière. Il avait de ces habitudes qu'elle avait vainement tenté d'adopter, mais aujourd'hui, ce n'était plus que de bons souvenirs, de belles images, disait-elle! Parmi ces belles images, entre autre celle-ci: dans cette chambre haute perchée où le soir, jusqu'à minuit passé, écoutant le grillon par la fenêtre grande ouverte, parfois passait la lune... Etrange phrase qui faisait passer la lune dans une chambre!...
Ce soir, elle ouvre le volet sur une nouvelle lune. Les grillons sont là, aussi, accompagnés des crapeaux. On n'entend plus les chevaux dans le pré. Sans doute ont-ils enfin cessé de déambuler. Les mouches sont allées dormir à leur tour... Le Samouraï écoute une cassette en tapotant du pied et profère des sons rauques dans la nuit.
Ce temps-là s'est écrit et s'est allongé sur le cahier semblant s'être arrêté à tout jamais. Elle croit que ce ne sont que de jolies figures de style qui lui permettront surtout de retrouver ces instants par la relecture. Elle pense soudain aux roses dans la bouteille posée sur la caisse à côté du lit et la photo du premier bébé... Son petit "gâté"! Il y avait de superbes rosiers et autant de bouquets de roses qu'elle désirait. Le luxe, c'était l'image de ces roses... De temps à autre, le chant des crapeaux reprenait plus fort dans la nuit calme et sereine. Elle aimait à écrire toutes ces petites choses comme on prendrait une photo ici et là... Encore une... Par moment, les roses embaumaient jusqu'à ses narines telle une onde qui se ballade!

jeudi 17 avril 2008

LE BONHEUR D'UNE MÈRE



























Un beau jour de juin elle redécida d'écrire, sentant les vacances, les jours vacants arriver. Sans autre grand espoir que de se retrouver elle-même... Elle ressentait le besoin de préparer un temps soit peu cette rencontre avec le bébé à venir. Le besoin de reprendre ce moyen qui lui était déjà ancien, celui de l'écriture quotidienne.
Elle lisait souvent. Elle suivait des livres lentement un peu chaque jour, des livres qui devenaient différents selon le lieu où elle les lisait. Peu à peu, elle se sentait un peu frustrée de toujours se préoccuper de l'existence de personnages qu'elle ne verrait jamais, qu'elle n'aurait d'ailleurs jamais envie de connaître. Elle sentait que tous ces mots qu'elle lisait auraient pu être employés en fait à se dire, elle, à se raconter à son tour et qu'alors, son vécu ne se perdrait plus sans cesse dans les méandres de l'oubli. Car elle sentait tout ce temps qui commençait déjà à lui échapper, ces jours dont elle ne voulait pourtant pas chercher à se souvenir méthodiquement. Elle savait qu'il suffisait de quelques lignes par jour pour se retrouver. Elle savait que cela suffisait pour retrouver le personnage qu'elle était, celui que chaque jour elle cherchait à retrouver, à rencontrer, à redéfinir. Dans chacun de ces moments, la difficulté en était si grande que les larmes lui montaient aux yeux immanquablement...
Alors elle prenait la voiture.
Depuis quelques jours, quelque chose se passait en elle, une sorte de besoin de se dire... Une prise de conscience? Et puis il n'y avait personne à qui se dire... Finalement, ce qu'elle avait à dire n'était que du radotage de grand-mère - comme beaucoup de romans d'ailleurs.. Sauf que... - et ce radotage-là, elle n'avait qu'à faire comme les autres, l'ECRIRE!

DESIR D'ECRIRE



Ecrire était aussi chez elle une sorte de thérapie, son psychanalyste de luxe, un confident sans corps et sans âme. Elle se souvenait de ces quatre gros cahiers - ni plus ni moins gros que celui qu'elle tenait dans ses mains - ces cahiers qu'elle avait remplis entre ses onze et vingt ans... Refuges de ses joies et de ses peines d'adolescente, dont le contenu est si intime qu'il lui est littéralement impossible de les relire sans se sentir dans des états mentaux insupportables! Mais maintenant elle n'a plus ni joie ni peine à raconter seulement les choses les plus simples qui sont dans sa tête.
Par exemple, cet après-midi, elle se sent fatiguée mais bien pourtant. Elle ne fait rien de spécial, elle s'allonge un peu partout dans cette maison pour lire tranquilement ou écrire. Par exemple, de temps en temps elle aperçoit par la fenêtre les chevaux qui déambulent inlassablement dans leur pâture. Ou bien elle sent tout particulièrement la température si douce depuis un mois.
Elle avait pris la voiture pour aller acheter le cahier avec l'intention d'en noircir les pages. Elle se disait qu'elle ne l'écrirait que pour elle-même, sans autre témoin qu'elle-même. Elle pourrait donc y mettre tout ce qu'elle voudrait y retrouver plus tard, quand cette époque serait révolue, que les temps auront changés.
Ecrire par exemple les queues des chevaux qui fouiaillent sans cesse autour de leurs cuisses... Ce genre d'image qui lui font ramener instantanément le corps et l'âme dans un passé proche ou lointain. Comment écrire, par exemple, pour se remettre dans cette tiédeur, dans cet environnement de verdure, cette approche du temps vacant?... Lorsque le plein temps scolaire aura repris, dans les six longs mois à venir, sans débander des rigueurs de l'hiver, de celles qui nous plongent chaque année progressivement dans les difficultés!... Et puis il y a les lettres de correspondance qu'elle ne sait subitement plus faire! Elle ne sait plus y mettre ce contenu poétique qui faisait de sa vie une mine de beaux moments bien qu'entrecoupés de longues heures passées morfondue au fond de son terrier... Brusquement, elle ne peut plus raconter les fleurs, les oiseaux, les grands arbres qui lui sont quotidiens, peut-être parce qu'elle les voit tous les jours et qu'elle ne se donne plus le droit d'en parler. Il n'y a aucun raisonnement qui puisse expliquer cela. Elle ne peut plus en parler, c'est évident, mais elle ne peut absolument pas dire pourquoi. Ici, dans le cahier qu'elle vient d'acheter, le pourra-t-elle à nouveau?

SI SENSIBLE!

























Cela lui semble maintenant sans importance. Elle a l'impression qu'il lui suffit de les respirer, que cette jouissance n'a pas besoin d'autre chose. Alors pourquoi insister?... Cela lui rappelle les lettres merveilleuses échangées avec le P'tit Lu... Il fallait vraiment vivre entre quatre murs pour écrire des choses pareilles! Pourtant c'était beau et plein de qualités... Etrange tournant de la vie!
Il faut dire qu'un rien pouvait la faire déraper, une rencontre surtout. Elle pouvait se retrouver plongée dans le trouble le plus total et avoir beaucoup de mal pour parvenir à s'en extraire. Il suffisait d'un rien, une pauvre petite phrase et elle se noyait carrément! Elle préférait bien sûr éviter ce genre d'évènement. Cependant la solitude lui semblait bien pauvre en regard, arriverait-elle à s'en contenter? Elle se souvint des vacances de Pâques. L'isolement avait été si lourd qu'elle était restée dix jours durant sans la moindre activité. Si ce n'était que cela encore - il peut être agréable de ne rien faire! - mais en fait, pendant ces journées solitaires elle en était venu fréquemment à verser des larmes de dépit devant son impuissance à se gérer. Elle se disait alors qu'il valait mieux qu'il y ait quelqu'un, même si ce n'était pas dans les meilleures conditions. Dans ces moments-là, il lui semblait qu'il ne manquait qu'une chose, une seule clé à son bonheur: un climat plus clément. La cause en était peut-être ces douloureuses fins d'hiver où elle ne suportait plus rien... Enfin, elle commençait à se méfier et se disait qu'il fallait éventuellement prévoir une diversion qui ne serait pas contraignante.