samedi 4 août 2007

COUP de GRISOU... le REVEIL!

















§ 3 - COUP DE GRISOU
Je me suis endormi tôt hier, Dix heures trente.
Le coloc m'a réveillé plein de fois en fermant les portes bruyamment... En dormant, j'entendais comme un vacarme!
Ce matin, sept heures. Je n'écris pas les mots justes qui m'apparaissent. Je ne saurais pas voir si écrire modifie le déroulement des pensées de mon sommeil.... Je me souviens avoir constaté une pagaille monstre dans mes idées, mais seulement par manque de structure. C'est sans douleur! Sans celle que j'ai trimbalée toute la soirée en passant au centre équestre de l'UCPA de la Courneuve... J'avais comme un désespoir fou de me sentir identique à mes vécus équestres passés. Le temps n'a aucune empreinte... Emotion immuable, à vie! Ça me provoquait une espèce de désespoir mortifère, je me sentais pris dans un sas entre l'état de vie et l'état de mort...
Tout sens social était perdu! Il n'y avait plus de sens à rien... J'avais la douloureuse impression de végéter au milieu des acivités humaines, d'être un parasite... Un poison?
J'ai regardé le film de Valérie Mrejean puis la conférence de Deleuze sur l'esthétique au cinéma...
Donc ce matin, la soupe dans la tête, tout en vrac, simple constat. Plus rassurant qu'hier où ça faisait mal, où je me sentais décollé du monde des autres, détaché, posé là dans un espace de non-droit, de non légitimité... L'après-midi, je lis une brochure sur la république!
Impression très nette: j'attend que ma mère joue son rôle, qu' elle me transmette par la parole ce que je n'arrive pas à intégrer affectivement: mon rôle social... Ma mère n'aurait-elle fait que survivre?...
Ainsi la soupe du premier réveil, je n'ouvre pas les yeux, je sens la même chose qu'à mon retour du centre équestre... Deuxième réveil, pensées en vrac: sensations, souvenirs, amours, désirs... Le quotidien d'hier que je n'avais encore jamais vécu, ainsi se clarifie avec le reste. Chaque élément va se ranger dans sa case, se reconnait un lien de parenté avec les autres... L'état destructuré et douloureux dans lequel j'étais, me donne l'impression d'un produit chimique-souvenir que l'on dépose dans une solution-structure mémoire provoquant une émulsion lente et progressive qui atteint le degré de l'erruption volcanique où tout est craché, éparpillé, mis à jour, comme si j'étalais autour de moi mes tripes psychiques!... La douleur de l'écorché, à vif!
Etat d'émotion extrême... Sans partage, en solitaire, au milieu des autres qui ne voient rien!... La même émotion partagée au salon du livre ou au douzième Maghreb des livres ou à Bretonneau, etc... La même qui se partage en toute convivialité et permet de faire circuler l'énergie qui se fige et fait mal dans la solitude... Ce n'est que le réel: tu partages, tu vis, tu ressens seule, tu souffres (dans certaines conditions, pas toujours bien sûr!).
Je parle, (j'écris) une émulsion, une réaction chimique amplifiante... Tout rentre alors à nouveau dans l'ordre, chaque chose à sa place... Il y a là un plaisir certain à trouver dans chaque tiroir une quantité de souvenirs de diverses importances, proches les uns des autres dans leur signifiants. Ils forment une chaîne que l'on peut articuler comme on veut, je le fais souvent chronologiquement, comme un jeu de construction pour enfant, tout prêt et chaque fois rénové d'une nouvelle pièce qui lui apporte son actualité... Une sorte d'esthétique du quotidien.
Pensée vague, en cours d'élaboration autour d'une idée: le don. Quelle est l'authenticité du don? Pas seulement donner pour donner mais savoir pourquoi on donne et comment on donne. Trouver la vraie valeur du don...
Vingt trois heures trente, tout semble à nouveau à sa place. Je me sens neutre et dans la possibilité de disposer de moi-même.

§ 4 - LE REVEIL
La sonnerie coupe brusquement le cours de mes pensées. Celles-ci tentaient de s'articuler tant bien que mal comme d'interminables connections sur une page d'ordinateur!... Quand la sonnerie retentit, il ne reste plus rien, comme si tout s'était envolé!
Je me réveille calmement, la pensée plate... On dirait qu'il n'y a rien que le programme établi la veille. Je m'étonne de ne pas sentir rôder en moi la remise en question de sa légitimité. Ça a l'air OK, il n'y a pas de remise en cause... Tout arrive en fait au moment de mettre des chaussures. Je ne sais même pas qu'il me faut les mettre, je sais seulement, un peu, que je dois m'habiller supplémentairement! Mais en fait quelque chose apparaît soudain dans ma tête au moment où je conçois l'acte à mettre en action et que je l'exécute. Cet acte simple et naturel installe soudain une chappe de doutes: mes activités personnelles sont résolument dérisoires et même pitoyables! Ce n'est pas l'acte lui-même qui l'est mais le dénuement de la situation: aller à l'hôpital , récuperer les radios, passer au club du quartier, manger cent grammes de pâtes chinoises... Que se passe-t-il donc?
Pour supporter et peut-être accepter, je prend des photos. A chaque photo je place une intention précise et dessinée, qui note en fait une sorte de souffrance de l'instant, une déchirure à être au milieu des autres, à les voir, les entendre... Je vois "la misère du monde" de Bourdieu et j'entend les paroles rémanentes des réminiscences de chacun... Je vois combien chacun s'applique à s'en sattisfaire malgré la dérision qui le caractérise! Qui peut croire à tant d'ingénuité?

Mal à la tête imposé comme un mauvais symptôme!!! Je décide de ne pas croire à ce postulat. Aujourd'hui, j'attend un coup de fil miracle. Je m'assois, le mal de tête disparait! Le soleil dessine la fenêtre sur le mur...
J'ai le souvenir d'avoir cherché mes propres définitions sur les mots d'hier dans le cabinet du consultant. Le souvenir d'avoir résisté pour ne pas me faire ranger dans des catégories établies et décrétées pour moi. Je me souviens l'avoir entendu accepter de nouvelles nomenclatures et qu'il les a prises en compte, ce qui m'évite de croire à la folie et me permet au contraire de croire au développement de ma pensée même si elle s'exprime mal à propos à certains moments! J'ai le souvenir d'en être arrivé à faire un consensus avec moi-même sur le refus d'occulter et de faire disparaître les moments d'absence, sous des déguisements d'activisme(gym ou autre animation...). J'ai le souvenir de tout ça mais surtout celui de ne pas perdre ce que la misère existencielle m'apporte: une conscience des phénomènes d'absence que l'autre peut avoir en particulier quand l'angoisse l'occupe et le détourne de la prise de conscience. Il est tellement facile alors, de lui faire approcher sa vérité en confirmant sa plainte par une écoute en miroir de sa plainte! Cette articulation de soi dans le miroir de l'autre... Et grandir, grandir à tout âge! Sans misérabilisme, sans culpabilité... En toute simplicité!
Si je ne veux pas être esclave de ce désinvestissement morbide, je ne souhaite pas m'en débarasser non plus. Je veux pouvoir en faire un outil de travail efficace!
Je peux être plus ou moins plombée. Où est, où sont les nuances subtiles de ces nuances de l'intrusion, des mouvements d'entrée et de sorties, de proximité plus ou moins envahissante de l'état morbide? Comment peut se décrire l'histoire à chaque moment du phénomène?
... Le corps m'abandonne, il ne répond plus... Simple état de fatigue qui, en prenant sens, justifie l'appélation "contrôle" de dépresion... Pourtant il y a perte de sens des activités dont le corps seul permet le passage à l'acte. Il agit comme par soustraction, par retrait.

Cette fois-ci le sommeil ne me semble pas avoir changé quoique ce soit. Puis après avoir somnolé à deux reprises, le corps se plombe comme s'il ne voulait plus bouger. Je pense aux flyers que j'ai ramassés hier. La curiosité me pousse, je l'assouvi. C'est alors que je prend conscience de la place protectrice occupée par le consultant. J'y vois de plus en plus précisément la place de mon frère et du rôle de protection que je lui ai fait jouer à partir de son "sauvé la vie" bien réel!
J'avais vingt cinq ans, je préparais mes examens. Il en aurait eu trente deux, c'est l'âge que je donne au consultant.
Cette protection est finalement bien précise dans mes souvenirs. Je l'ai élaborée dans les jours qui ont suivi la noyade dont il m'a sauvé. J'ai vécu cette protection pendant les deux ans qui l'ont séparé de sa mort, cette mort qui a rompu le processus. Ce matin, je sens la possibilité de reprendre ce processus en pleine conscience. C'est la pensée de cette protection qui est tangible dans nos entretiens, cette pensée m'appaise.

Quand je n'ai pas les idées mornes mais que j'ai du mal à me sentir OK, je peux mettre ce OK en doute et en chercher la cause. C'est alors que je me sens très précisément rassuré par le prochain rendez-vous. Tout comme j'étais rassuré par la pensée de mon frère, rassuré qu'en cas de danger, il pouvait me sauver la vie. La preuve en était qu'il l'avait déjà fait! En revenant sur cet évènement, j'affirme ne pas m'être jeté à l'eau dans l'idée qu'il pouvait venir à mon aide en cas de besoin. Je ne me suis pas douté une seule seconde non plus, que l'acte que j'effectuais pouvait devenir un échec et encore moins mettre ma vie en péril! En fait, je n'ai jamais su ce qui s'était réellement passé entre la deuxième fois où ce garçon qui se noyait m'avait enfoncé dans l'eau et le moment où je me suis réveillé, assis sur les galets de la minuscule plage, derrière ce rocher glissant. Mon frère était assis là, à côté de moi, dans la même position que moi, le bras droit autour de mes épaules. J'avais les bras croisés sur mes genoux repliés supportant mon front... Première sensation de ma propre mort. Mais en place d'être plus prudent, de réfléchir aux dangers de certains actes et de celui-là en particulier, je ne me souviens d'ailleurs aucunement en avoir parlé avec quiconque, j'ai plutôt investi l'évènement de ce "sauvé la vie" dont je me trouvais impressionné au sens propre du terme! Il est clair que cette impression perdure encore... Elle apparaît dans des situations variées. Le danger s'est transformé en trouble psychologique et le sauveur apparaît par flash, figure protectrice très subtile... avec un mélange de non-dit consensuel lié à une valeur fraternelle de la relation et de transmission de savoir mêlé au transfert. C'est en prenant conscience de l'élaboration d'un transfert possible et le réalisant du même coup que ce phénomène délicat et plus ou moins réussi se produit. Lorsque le transfert se déclanche librement, une relation très particulière s'installe immédiatement. Un espèce d'affect de reconnaissance s'installe, que l'autre me renvoit. Quand j'ai joué le "journaliste" avec le questionnaire au club des séniors, je me suis mis volontairement dans cet échange de confidence totale, d'attention délicate et de désir de transmission.

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